dimanche 11 mars 2012

Madonna

En 2005, il y avait eu « Confessions On A Dancefloor ».



J’avais eu raison de trafiquer mon transistor. J’étais vite tombé sur des ondes inconnues. Ma connaissance de la langue martienne commença à évoluer. J’appris vite leurs déclinaisons, la syntaxe, les conjugaisons. Mais l’appareil tomba en panne. Mon chat l’avait fait tomber. Mon poste s’était brisé en mille morceaux. Un vrai puzzle. Le réparateur du coin parvint, non sans mal, à les recoller.

Je réussis alors à capter la FM., mais ça venait toujours d’une autre planète. L’émission restait audible, à peine compréhensible. On percevait la voix d’une femme plus toute jeune sur des orchestrations verdâtres. Ça devait être le dernier Madonna. La bimbo avait vieilli, mais elle avait gagné en maturité.



Il y en a qui se confessent sur un divan, d’autres dans les boîtes de nuit, sur les pistes de danse. C’est que ce que dit le titre de l’album. La chanteuse y est fidèle à elle-même, à ses anciens aphorismes : « C’est seulement quand je danse que je me sens libre » (« Into The Groove »). Sa couronne ne s’est pas brisée. C’est toujours la reine des parquets. Je ne veux pas dire que c’est la reine des femmes de ménage, bon sang ! Qu’est-ce que vous êtes mal intentionnés, vous alors. Je vous dis que c’est la reine des pistes de danse ! Cette fois-ci, elle a samplé Abba, fait un bœuf. Mais c’est bon, le bœuf, et c’est bon les abats.

La sauce « Mirwais » étant moins copieuse qu’avant, elle a préféré la sauce « Stuart Price », un jeune type de 28 ans en 2005, qui n’avait que six ans en 1983 quand la fausse Madone chantait « Like A Virgin » avec des kg de pendentifs qu’elle brinquebalait, et sa démarche alors sans grâce. Mais, depuis, quels progrès !

« Gimme, gimme, gimme a man after midnight… ». Il n’y a donc pas que la cabale et les sciences occultes qui l’intéressent, cela nous rassure. Mais je préférais quand elle chantait son truc en espagnol, « La Isla Bonita ». Lady Madonna, DJ at her feet…

Il y a quelques années, le titre “Au lit avec Madonna” m’avait fait songer à cette vieille chanson des Beatles : “Lady Madonna, lying on the bed, / Listen to the music playing in your head”. La madone des dancings a remplacé la madone des sleepings.



Je serais Madonna, plutôt que de débaucher Mirwais ou tel DJ, j’irais voir du côté de Fischerspooner. Il y a dans « Odyssey » un morceau merveilleux, d’une très grande subtilité, « A Kick In The Teeth ». Ces gens ont inventé une musique délicate, intimiste, chuchotée. Comme si  Simon and Garfunkel avaient su aborder le virage électro pop, mais on dirait que ces deux New Yorkais se sont noyés sous leur pont aux eaux glauques. Le résultat est nettement supérieur à la production ambiante, aux rythmes banalement hypnotiques. Ces eaux-là sont encore pures et profondes. C’est comme si les Pet Shop Boys avaient retrouvé le niveau de « West End Girls » !  Fischer aux synthés, Spooner au chant, réhabilitent une pop de qualité, intelligente, ni racoleuse, ni vaine, ni arty. See how they run… On préférera donc « L’Odyssée » aux « Confessions »…



Autre souvenir : le Chili. Un jour je m’étais promené dans les rues de Santiago. En fond sonore, on entendait « La Isla Bonita », et c’était PARFAIT.

Cette chanson, que je considérais jusque-là comme banale, ce jour-là, je l’ai enfin comprise : c’était TOUTE l’Amérique du Sud, et j’ai alors réalisé que Madonna pouvait être parfois une très grande artiste.







Jerome Pintoux

2012

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